LA GAZETTE DU CLUB DES MONSTRES |
NUMÉRO 49
par Jean-François Berreville
LE MAITRE DES MARIONNETTES Jim HENSON disparaissait subitement il y'a vingt ans d'une pneumonie, le 16 mai 1990, à l'âge de 53 ans. L'homme est mondialement connu pour avoir créé le MUPPET SHOW, spectacle exubérant à base de marionnettes autour de la figure emblématique de Kermit la grenouille, regorgeant de personnages pittoresques tels Scooter, le stagiaire maladroit et arriviste, le délirant cuisinier suédois, Sam l'Aigle américain, toujours sentencieux et exagérément solennel ou encore les personnages des deux grincheux aux saillies particulièrement réjouissantes. On lui devait également une autre série pour le jeune public, 1 RUE SESAME aka SESAME STREET. Jim HENSON a cependant aussi été impliqué dans la création de créatures d'aspect plus réaliste. Une multitude de personnages exubérants Né le 24 septembre 1936, Jim HENSON a grandi dans le Mississipi, avant que sa famille n'emménage dans le Maryland, non loin de Washington. Influencé par les émissions de son enfance à base de ventriloques et de marionnettes, comme KUKLA, FRAN AND OLLIE, il crée en 1955, par le biais du module universitaire auquel il s'est inscrit, un programme pour enfants à base de marionnettes, SAM AND FRIENDS, pour la chaîne WRC-TV, lequel succède à une première initiative similaire pour WTOP-TV conduite l'année précédente alors qu'il était encore au lycée. Jim HENSON s'attache à obtenir le meilleur parti de son art, en utilisant judicieusement le cadrage pour dissimuler les animateurs, et en dotant ses personnages de vraies articulations ainsi que d'une bouche capable de simuler la parole. Il prend comme assistante marionnettiste sa camarade d'université Jane NEBEL, qu'il épouse. Ayant eu rapidement une famille à nourrir, Jim HENSON, qui a obtenu un diplôme d'économie, investit sa propension à la créativité dans le domaine de la publicité, doutant que sa passion pour les marionnettes, qui l'a conduit à se rendre plusieurs mois en Europe pour y rencontrer ceux qui participent de cette longue tradition, lui assure un revenu suffisant. Cependant, l'envie de réaliser du pur divertissement ainsi que la notoriété des marionnettes de SAM AND FRIENDS apparues notamment dans nombre de publicités, l'incitent à lancer la Compagnie des Muppets, qu'il fonde à New York avec son épouse en 1963. Il ne tarde pas à engager son vieil ami Frank OZ pour que celui-ci remplace sa partenaire appelée à pourvoir à l'éducation des enfants du couple. Il établit finalement - comme Ray HARRYHAUSEN, un autre Américain - son quartier général en Angleterre en 1976, ce qui engendrera parfois un sentiment de désaffection pour les représentants de la branche demeurée aux USA, chargée de la diffusion des réalisations sur le continent nord-américain.
Décor de la série THE LAND OF GORCH, première esquisse d'un monde fantastique. Jim Henson et Kermit Après une série de films expérimentaux remarqués, comme CUBE dans lequel un homme ne peut mystérieusement sortir d'une pièce exiguë, à l'inverse des visiteurs qui peuvent aller et venir normalement, Jim HENSON conçoit les deux grands shows qui feront sa notoriété, mêlant des acteurs à des marionnettes ainsi qu'à des personnages interprétés par des comédiens costumés, 1 RUE SESAME en 1968 et le MUPPET SHOW, qui dure de 1976 à 1981 et associe des sketchs à des numéros musicaux, lequel a tant de succès qu'une parodie moquant l'actualité politique voit le jour en France, le BÊBÊTE SHOW. Les personnages saugrenus du MUPPET SHOW reviennent par la suite à l'occasion de plusieurs films et de programmes télévisés spéciaux, ainsi que d'un succédané pour les tous petits, les "Muppets babies", montrant les versions des personnages dans leur très jeune âge. Néanmoins, Jim HENSON avait toujours eu à cur de se renouveler et proposa de nouvelles séries comme FRAGGLE ROCK (1983-1987) , qui mettait en perspective notre monde, représenté par un acteur ( Michel ROBIN dans la version française ) et son chien ( une marionnette réaliste ), avec d'autres mondes coexistants, l'un peuplé par un genre de lutins vivant sous terre, rappelant les Muppets, voisinant avec celui de Lilliputiens assimilés à des insectes sociaux, ainsi qu'un dernier habité par des ogres velus, comme ceux du MUPPET SHOW. Bien que principalement destiné au jeune public, l'univers humoristique de FRAGGLE ROCK n'est pas dépourvu de poésie, et approche quelquefois la philosophie. Son projet DINOSAURES, vision satirique de la famille et du monde contemporain à travers une famille de Dinosaures humanoïdes truculents vivant dans une société très semblable à la nôtre, ne verra le jour qu'après sa disparition, en 1991.
Faz FAZAKAS, un des principaux techniciens de l'équipe de Jim HENSON, ici à l'oeuvre sur les Dozers de FRAGGLE ROCK. Jim Henson et Fraggle Rock. Jim HENSON refusa par contre, à l'instar de la Compagnie Disney, de s'associer avec le marionnettiste Paul FUSCO qui avait proposé l'idée de la série ALF, contant les facéties d'un extraterrestre velu et blagueur interprété par une marionnette, dont le style et l'humour, non dénué de profondeur, étaient pourtant voisins des siens, craignant que cela ne porte préjudice à ses propres projets, et s'avérant d'autant plus réticent que les deux hommes avaient le même agent en commun, Bernie BRILLSTEIN. Par la suite, HENSON fut conquis par la série et devint ami avec Paul FUSCO.
Scred, vu dans LAND OF GORCH, un des premiers êtres d'allure fantastique créé par Jim HENSON. Le MUPPET SHOW Le créateur du MUPPET SHOW parvint à communiquer sa passion à nombre de collaborateurs qui l'accompagnèrent durant des années dans ses divers projets. Il considérait que divertir la jeunesse, dans un monde souvent difficile, était une entreprise tout à fait estimable; ce père de famille de cinq enfants était aussi désireux d'utiliser son art pour suppléer à l'éducation des plus petits, en particulier ceux des familles défavorisées, en s'associant à des projets les initiant aux rudiments de la lecture, ainsi qu'en les sensibilisant à la défense de l'environnement; il estimait aussi que, si ce type de programme pouvait inciter à propager certaines valeurs comme le respect d'autrui et la protection de la nature, il convenait en revanche de le préserver de la politisation. Un autre monde, un autre temps, à l'âge du fantastique L'ambition artistique de Jim HENSON donna toute sa mesure avec un projet cinématographique incroyable, THE DARK CRYSTAL. Le concepteur du MUPPET SHOW réfléchissait depuis longtemps à une fresque qui mettrait en scène des créatures grotesques, d'allure reptilienne, revêtues de costumes saugrenus. Il avait créé en 1979 l'atelier Jim Henson's Creature Shop, de manière à disposer d'un lieu voué spécifiquement à l'élaboration des personnages, permettant à une équipe de perfectionner constamment les techniques pour rendre les marionnettes plus vivantes et maniables. En 1981, il avait délégué son assistant Frank OZ sur le film L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE pour l'animation du personnage du maître Jedi nommé Yoda, marionnette amenée à effectuer une prestation convaincante auprès d'un acteur réel. Cette expérience et les possibilités de l'atelier l'incitèrent à penser qu'il pourrait mener à bien le projet d'un long métrage entièrement interprété par des créatures fantastiques crédibles. On pourrait aussi trouver quelque filiation entre DARK CRYSTAL et THE LAND OF GORCH, une séquence de l'émission SATURDAY NIGHT LIVE avec un décor fantastique, dont l'un des personnages, Scred, ressemble beaucoup à un précurseur des Skeksès, même si sa tête évoque davantage le dragon que le vautour.
Un être contemplatif issu de l'univers de THE DARK CRYSTAL. Quatre vedettes du film. DARK CRYSTAL reprend le principe des émissions de marionnettes conçues par Jim HENSON, mais sur une grande échelle : un plateau surélevé recouvert de panneaux mobiles dissimule au regard des spectateurs les animateurs, qui se contorsionnent pour donner vie aux différents personnages. Des acrobates sont recrutés pour explorer toutes les potentialités du corps humain afin de de donner vie aux morphologies les plus variées, le cas sans doute le plus spectaculaire étant probablement celui des montures des Gelflings, les Echassiers du vent bien nommés, interprétés par des équilibristes dont chaque membre est prolongé par une échasse. Le célèbre maquilleur Stan WINSTON sera si impressionné par le résultat qu'il demandera à rencontrer Jim HENSON et à être autorisé à s'inspirer de ses techniques pour ses propres créations; les animations ingénieuses de la Reine d'ALIENS et des "Drones" de la troupe de choc de L'INVASION VIENT DE MARS en sont en quelque sorte les héritiers ( voir "Un magicien des effets spéciaux s'en est allé" ). Pour s'assurer de la qualité de l'univers de DARK CRYSTAL, Jim HENSON, qui s'est pour l'occasion associé à un producteur de L'EMPIRE CONTRE-ATTAQUE, Gary KURTZ, recrute l'illustrateur Brian FROUD, un spécialiste du monde féérique celtique. Celui-ci invente avec un luxe de détails l'ensemble des éléments visuels, des créatures aux différentes architectures en passant par les animaux de la forêt, les ustensiles et les ornements. Le résultat est éblouissant, et la partition de Trevor JONES apporte le supplément d'émotion nécessaire pour faire de cette fable intemporelle sur le bien et le mal une réussite complète susceptible de plaire à tous les publics ayant gardé le goût du merveilleux.
Un des plateaux de tournage surélevé, constitué de plaques coulissantes, de THE DARK CRYSTAL, en l'occurrence l'observatoire astronomique d'Aughra. Un animateur s'entraîne à incarner dans une position périlleuse un Échassier du vent.
Un arbre ambulant de THE DARK CRYSTAL. Une autre créature de THE DARK CRYSTAL, tenant à la fois du végétal et de l'animal. Jim HENSON réédite quelques années plus tard l'expérience avec un peut-être un peu moins de succès au travers de LABYRINTH, alors qu'aux cruels Skeksès roulant des yeux en piaillant, aux allures d'oiseaux de proie dépenaillés, à la fois grotesques et inquiétants, succède dans l'emploi du personnage maléfique le chanteur David BOWIE, serti dans un costume évoquant quelque peu une vedette de l'époque du "disco". Alors que DARK CRYSTAL avait son univers spécifique, ce nouveau long métrage qui reprend partiellement le format du Muppet Show avec ses séquences chantées par la vedette invitée déconcerte un peu les admirateurs du premier film. Jennifer CONNELLY y interprète une adolescente candide qui tente d'arracher au sorcier maléfique son petit frère, en compagnie de personnages extravagants dans le style de ceux de la nouvelle version du MAGICIEN D' OZ réalisée par Walter MUNCH pour les studios Disney.
Jim HENSON sur le tournage de LABYRINTH, dirigeant Jennifer CONNELLY face à Ludo, imposant personnage fantastique.
Si les murs ont parfois des oreilles, ceux de LABYRINTH sont aussi pourvus d'yeux. Remerciement à Christophe pour cette photo rare de ce surprenant buisson. En 1987, Jim HENSON élabore, dans la lignée de son adaptation des Animaux de Brème, une série télévisée sans égal, MONSTRES ET MERVEILLES ( THE STORYTELLER ) qui donne toute sa dimension au merveilleux à la télévision. Un narrateur ( John HURT grimé ), en compagnie d'un chien selon la formule éprouvée de FRAGGLE ROCK, raconte des histoires fabuleuses issues de contes européens. L'esthétique soignée et la qualité des effets spéciaux participent d'un climat très particulier, mettant en valeur une histoire dont les brillants atours servent une réflexion morale. Une seconde série moins connue, THE STORYTELLER: GREEK MYTHS (LEGENDES GRECQUES), s'attachant à la mythologie gréco-romaine, voit le jour deux ans plus tard sur le même modèle, malgré un ton plus sombre, illustrant les mythes éternels du vol d'Icare, de la mésaventure d'Orphée, de Thésée face au Minotaure ainsi que du combat de Persée contre les Gorgones. Malheureusement, ces deux séries ne rassemblent à elles deux qu'un nombre fort limité d'épisodes. Une autre série connaîtra une fin prématurée, tout aussi triste. THE JIM HENSON HOUR, en 1989, met en scène le fameux animateur lui-même, autour de son univers, incluant aussi bien les Muppets renommés que les créatures les plus variées apparaissant dans des fictions au ton plus réaliste; il n'hésite pas également à montrer les coulisses des effets spéciaux et de l'animation des Muppets, tel un magicien au sommet de sa gloire prêt à révéler au spectateur certains de ses secrets. Pourtant, les derniers épisodes ne sont même pas diffusés par les chaînes de télévision.
Les protagonistes d'un épisode de MONSTRES ET MERVEILLES; un réalisme onirique bien loin du monde factice du dernier film de Tim BURTON adaptant Lewis CAROLL. Une des créatures fabuleuses de MONSTRES ET MERVEILLES.
Un Griffon qui force au respect. Après Ray HARRYHAUSEN, Jum HENSON s'est attaché à retranscrire le mythe de Persée et de la Gorgone ( effets spéciaux de Nigel BOOTH ). Saisissant Minotaure issu de la même série. Un atelier d'effets spéciaux reconnu A partir de l'aventure de THE DARK CRYSTAL, la création d'êtres réalistes devient une activité à part entière au sein de l'atelier Creature Shop, indépendamment de la fabrication et de l'entretien des Muppets. Frank FAZAKAS, notamment, s'ingénia durant des années à perfectionner et miniaturiser les sytèmes radiocommandés, permettant d'animer les minuscules personnages de FRAGGLE ROCK, les Dozers, ainsi que d'obtenir une gamme plus riche d'expressions faciales pour les divers personnages. Des créateurs d'effets spéciaux appelés à une certaine notoriété y ont fait leurs preuves, comme Bob KEEN, qui se fera un nom sur les maquillages très morbides des écorchés de la série de films HELLRAISER tirés de l'uvre de l'écrivain Clive BARKER, ou Lyle CONWAY qui poursuit de manière autonome sa carrière avec des films comme le remake du MAGICIEN D'OZ de Walter MURCH et celui de THE BLOB réalisé par Chuck RUSSELL, avant d'assister Rob BOTTIN sur UN CRI DANS L'OCEAN, jusqu'à ce que la vogue des trucages informatisés ait pour effet de les évincer tous deux du tournage en même temps que de mettre brutalement fin à leur activité ( comme évoqué dans "les derniers grands créateurs déclarent forfait" ). La réputation du studio d'effets spéciaux de Jim HENSON lui vaut d'être engagé sur d'autres productions. C'est le cas de DREAMCHILD, film dans lequel Ian HOLM incarne le Révérend Charles DOGDSON, plus connu sous le nom de plume de Lewis CAROLL, racontant à la petite Alice ses célèbres fantasmagories. Lyle CONWAY, encore membre de Creature shop à l'époque, supervise les effets spéciaux donnant vie à des créatures à l'étrange réalisme, notamment aux personnages de la Chenille fumeuse de calumet, d'un grotesque réjouissant, et à celui de la "Fausse tortue" saisissante au point d'en être dérangeante; l'équipe de CONWAY uvre ensuite sur le monstre végétal du remake de LA PETITE BOUTIQUE DES HORREURS réalisé par Frank OZ, qui demeure la plus enjouée des plantes carnivores vues à l'écran.
Un Lapin surréel sorti de DREAMCHILD face à la petite Alice. La "Fausse Tortue" de DREAMCHILD.. Malheureusement, le dernier projet bien connu auquel le nom de Jim HENSON fut associé de son vivant est l'adaptation cinématographique du manga LES TORTUES NINJA, considéré par beaucoup - malgré les prénoms des protagonistes inspirés de ceux de peintres italiens de la Renaissance - comme le symbole d'une certaine sous-culture triviale à déconseiller à la jeunesse ( le technicien Frank FAZAKAS, dont le nom aurait inspiré celui du personnage de Fozzie l'ours du MUPPET SHOW, avait ironisé à leur sujet en disant qu'à l'instar des politiciens, elles étaient complètement humaines, à l'exception de la tête ). Jim HENSON n'avait lui-même apporté sa contribution qu'avec réticence, craignant que le contenu violent n'influence négativement le jeune public. Le studio d'effets spéciaux prit part au troisième volet de L'HISTOIRE SANS FIN, qui n'était plus l'adaptation de l'uvre de l'écrivain allemand Michael ENDE contrairement aux deux films précédents, mais une fantaisie s'en inspirant, laquelle propulse des personnages fantasmagoriques dans le monde réel, les pérégrinations d'un bébé "Mangeur de pierre" gaffeur et d'un arbre ambulant générant des situations cocasses. On y retrouve notamment le dragon Falkor, qui ressemble encore davantage à un chien, et est remarquablement bien animé. Creature Shop conçoit les animaux préhistoriques délirants de l'adaptation cinématographique du célèbre dessin animé LES PIERREAFEU, dont les héros sont interprétés par le truculent John GOODMAN et le maladroit Rick MORANIS ( CHERI J'AI RETRECI LES GOSSES ) . Il construit le monstre animatronique impressionnant du PACTE DES LOUPS, qui manqua de blesser la vedette, mais fut cependant remplacé dans le montage final par sa doublure virtuelle. Il réussit aussi le prodige de donner littéralement la vie au pantin en bois de PINOCCHIO face à Gepetto interprété par Martin LANDAU, dans l'adaptation de 1996 du conte de COLLODI, confortant les vues de Jim HENSON aspirant à faire de marionnettes de vrais personnages.
L'Arbre ambulant de L'HISTOIRE SANS FIN 3, encore un étrange végétal dû à l'équipe de Jim HENSON. La fin d'une tradition Malheureusement, l'atelier fondé par Jim HENSON se convertit de plus en plus à la mode pour le virtuel, à l'instar de l'animateur image par image Phil TIPPETT ou du maquilleur Greg CANNOM. Si le film LOCH NESS dans lequel Ian HOLM incarne avec conviction un mystique défenseur de la tradition celte, antithèse de son personnage de scientiste d'ALIEN, comporte, outre quelques plans généraux en image de synthèse alors qu'un d'un petit modèle animé aurait été bien plus satisfaisant, une tête mécanique remarquable de réalisme de Plésiosaure, nombre des contributions récentes accordent une écrasante prédominance aux effets conçus par ordinateur. A côté de ses extraterrestres baroques de la série FARSCAPE produite par la société de Jim HENSON ou des humanoïdes patauds, évocation satirique des bureaucrates, du GUIDE DU RETOUR GALACTIQUE, réalisés selon des méthodes traditionnelles, Creature shop a conçu les manifestations surnaturelles du remake télévisé de JASON ET LES ARGONAUTES, pauvres succédanés immatériels des extraordinaires créatures de Ray HARRYHAUSEN, préfigurant tristement le remake du CHOC DES TITANS et autres PERCY JACKSON LE VOLEUR DE FOUDRE. Pour la série DINOTOPIA, à l'exception d'un bébé Tricératops, toutes les espèces de Dinosaures sont en images de synthèse. Dans LOST IN SPACE, les "araignées tripèdes" n'ont aucune réalité matérielle et les mutations du personnage interprété par Gary OLDMAN contaminé par les créatures sont simplement ridicules, comme si ses évolutions réitéraient celles du COBAYE ( film sur la réalité virtuelle ) au lieu d'être la traduction de transformations biologiques. Même pour l'adaptation cinématographique de MAX ET LES MAXIMONSTRES, dont les fameux monstres s'apparentent d'ailleurs à certaines créatures géantes du MUPPET SHOW ainsi qu'aux ogres de FRAGGLE ROCK, l' atelier d'effets spéciaux de Jim HENSON a réalisé des costumes pour les acteurs qui les interprètent, mais concession à l'air du temps et à la facilité, les expressions faciales ont été recréées informatiquement au lieu de procéder de mécanismes radiocommandés comme pour LABYRINTH. L'essentiel des effets spéciaux réalistes conçus par la compagnie concerne à présent des doublures animalières pour des publicités ou pour le cinéma, comme précédemment pour L'OURS de Jean-Jacques ANNAUD et BABE, LE COCHON DEVENU BERGER, ou plus récemment l'adaptation cinématographique des 101 DALMATIENS. Ces animaux extrêmement réalistes démontrent bien l'inanité du discours dominant prétendant que la plupart des trucages effectuées par des images numériques seraient irréalisables par d'autres procédés plus "conventionnels". Lorsqu'on constate à quel point ces créations sont indistinguables des vrais animaux avec lesquels elles voisinent, on ne peut que se désoler que les créatures imaginaires ne bénéficient plus au cinéma d'un semblable souci de réalisme.
La magnifique tête mécanique du monstre de LOCH NESS réalisée par Mak WILSON. Ce superbe Protoceratops n'existe que sous forme de maquette conceptuelle : pour l'adaptation télévisée de DINOTOPIA, le personnage de Bix a été entièrement numérisé ( image trouvée sur le blog www.gurneyjourney.blogspot.com ).
Hérissons pourvus de masques à gaz fustigeant la pollution automobile dans un spot télévisé. Le fils aîné de Jim HENSON, qui a pris la succession, affirme que son père, ayant toujours été attentif à utiliser de nouvelles techniques, aurait été très certainement partisan de l'utilisation de l'imagerie générée par ordinateur. Brian HENSON a évidemment une légitimité certaine pour se faire l'interprète du disparu; cependant, il n'est pas totalement interdit d'être plus dubitatif: en dépit de la variété des techniques, de la marionnette à l'animatronique radiocommandé, Jim HENSON à toujours maintenu un lien entre une créature concrète et des animateurs, ce qui n'a plus rien à voir avec un dessin animé généré par des infographistes. Certes, le créateur du Muppet Show avait mis en scène dans une attraction, MUPPETS 3-D, conçue pour un parc d'attraction Disney, un personnage numérique protéiforme nommé Waldo C. Graphic, mais celui-ci était bien présenté pour ce qu'il était, un être virtuel généré par ordinateur. Cela paraît bien différent de la tentative plus récente de numériser la totalité des personnages du MUPPET SHOW, les rapprochant de l'univers du dessin animé alors qu'aussi fantaisistes soient-ils, ceux-là évoluaient originellement dans des décors élaborés, ce qui contribuait à leur spécificité. Il semblerait que l'éviction de Creature shop, qui avait travaillé sur le projet du film CUR DE DRAGON, au profit d'une version numérisée du monstre légendaire, ait contribué à la reconversion de la compagnie dans cette voie. On sait bien que les contes de fée ne durent qu'un temps; en dépit de son enthousiasme communicatif, Jim HENSON, on l'a mentionné plus haut, connut quelques désagréments avec les chaînes de télévision, qui déplaçaient sans ménagement certaines de ses émissions d'une tranche horaire à une autre, puis décrétaient alors que celles-là ne trouvaient pas leur public. La séparation d'avec sa compagne de toujours, mère de ses cinq enfants, l'a par ailleurs plongé dans la dépression. Un jour que son ex-conjointe lui rendait visite, celle-la le trouva particulièrement affaibli. Jim HENSON eut la prescience que son heure était arrivée. Il se laissa finalement convaincre d'être conduit à l'hôpital, mais son état se détériora en quelques heures de manière irrémédiable, succombant à une pneumonie qu'un examen précédent, réalisé alors qu'il était déjà souffrant, n'avait pas détectée.
Une statue de Jim HENSON et de sa plus célèbre création dans l'université du Maryland dans laquelle il a effectué ses études, érigée en hommage en 2003. Conformément à ses volontés, son enterrement fut à l'image de sa vie, une fantaisie colorée et joyeuse dont le noir était banni, avec des participants ayant revêtu le costume de certaines de ses créations. Sa compagnie lui a survécu, de même que l'atelier d'effets spéciaux, dorénavant établi à Los Angeles - après ses expériences décevantes récentes à la télévision, Jim HENSON aspirait à se rapprocher d'Hollywood. Les personnages les plus emblématiques, les Muppets, ont quant à eux été rachetés par les studios Walt Disney, conformément au souhait de Jim HENSON désireux de pouvoir se concentrer davantage sur la part artistique en cédant ses droits d'exploitation de la marque. Le nom de Jim HENSON survit aussi au travers de sa fondation, qui continue de promouvoir l'art de la marionnetterie en appuyant différents projets. Enfin, sa notoriété se prolonge à travers internet, une branche spécifique de l'encyclopédie en ligne Wikipedia ayant vu le jour exclusivement dans le dessein de célébrer ses créations, celle-ci ayant été nommée de manière explicite Muppet.wikia (muppet.wikia.com). En dépit de ses doutes initiaux, et malgré son existence écourtée, Jim HENSON a incontestablement réussi son pari de rendre viable durant de nombreuses années un empire fondé sur la marionnetterie.
"Tu crois que Jim HENSON pourrait être oublié? Cela m'étonnerait beaucoup." (photo de John HURT incarnant le narrateur de MONSTRES ET MERVEILLES conversant avec son chien ). Pour ceux qui souhaitent lire d'autres articles sur le sujet : hommage pour le 19ème anniversaire de sa disparition : http://720lignes.blog.lemonde.fr/2009/05/19/portrait-jim-henson-le-premier-des-muppeteers le site officiel de la compagnie : www.henson.com le site officiel de Creatures shop : www.creatureshop.com On peut voir certaines créatures animatroniques assez récentes de Creatures shop dans la vidéo: www.youtube.com/watch?v=m1dsFdjXgro&feature=related Le blog de Jean-François Berreville ou l'on retrouve le texte original et des documents différents:creatures-imagination.blogspot.com Jean-François Berreville |
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